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Humeur de vache

La corne aguichante, le pis serein,
Nonchalantes, nous regardons passer les trains
Et quand nous arrive du pré voisin
Le triste appel du mâle sur sa faim
C’est la hantise de l’éprouvette de verre
Qui frustre et stresse nos ovaires !

En effet, rien ne vaut la nature pour ce faire
Et jamais de sa vie la chaste génisse
Ne connaîtra de l’amour, les délices !
Si de par le monde tout va de mal en pis,
Permettez que je vous donne mon avis ;

Nous n’en ruminons pas moins de saines pensées.
La couche d’ozone s’étiole, c’est mal barré.
La faute à qui ? Pas à nous ni à l’herbe des prés
Mais bien à tous ces ensilages frelatés
Dont on gave nos consœurs cloîtrées,
À la panse intoxiquée, aux flatulences néfastes.

Les nôtres sont saines et nos bouses fécondes
Nourrissent la mouche, attirent le scarabée
Roulant sans fin sa boule noire et ronde.
Je vous le dis, des pets sains n’ont rien de néfaste !

Mais deux mille vaches dans une même étable,
Machines à produire du lait. Lamentable !
Comment voulez-vous qu’il soit onctueux, crémeux
Ces produits résultant de procédés honteux !
Comment ainsi entassées donner du bon lait,
Celui qu’il est plaisant de boire à longs traits ?

« Veaux, vaches, cochons, couvées... » Élevage intensif
Le tout pêle-mêle, il faut être productif !
L’être humain imagine et ça l’arrange
Sans que cela ne lui paraisse étrange
Que nous n’avons été créées qu’en un seul but ;
Finir dans son assiette, son ventre repu.

Les hommes ne sont pas sages
Qui confinent les animaux en cages
Dans des conditions loin d’être honorables :
Inconfort et manque d’hygiène redoutables.
Et tout cela pour de l’argent. C’est lamentable !

La corne aguichante, le pis serein,
Nonchalantes, nous regardons passer les trains...
Enfin... lorsque nous sommes en très bonnes mains.

24 juin 2016 - 22h 45

© Chantal Zingarelli

 

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