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Sous une pluie battante...

Sous une pluie battante quelques idées me sont venues.

Les voici :

J’ai fait un très beau songe 
Un songe qui me ronge : 
Recevoir une pluie de bienfaits.
C’est un rêve, il n’y a pas de fées.

Autant me plaît la frêle averse qui soigneusement lave mes vitres, que me déplaît la grosse pluie qui, en battant le sol terreux, salit ma porte de tâches boueuses.

Lors des premières chaleurs du printemps, la pluie nourrit et gonfle plantes et fruits, comme le cygne enfle son plumage pour y abriter ses petits.

Autant nous réjouit pour le gagnant la pluie des millions que lui verse la Française des Jeux, que nous attriste le souvenir de la pluie des obus qui en 1939-1940 ont englouti nos valeureux soldats.

La pluie de taxes qui s’abat sur la pauvre ménagère assombrit le ciel de ses vacances, mais lui permet, à son tour, de taxer les dirigeants de budgétivores.

Voyez ce gros orage qui, tel un père sévère, gronde un petit nuage parce qu’il lâche son averse sur la mer au lieu d’en fertiliser un désert.

Décidément la violence, un des maux qui affectent la société, a contaminé le ciel car, il y a quelque temps, un violent orage a violenté une terre sèche qui lui résistait.

Celle-ci a imploré : violent orage, ne me violente pas, mais attends que d’abord une petite pluie fine m’ait humidifiée ; alors j’apprécierai que tu me pénètres profondément. Mais avant ne t’abats pas brutalement sur moi, ce serait me violenter.

Mieux vaut sur les stars de cinéma une pluie de Césars, qu’une pluie de lézar-des sur la Maison du cinéma.

J’ai reçu un jour une pluie d’escargots. C’est quoi me direz-vous ? Hé bien c’est une pluie qui arrive très lentement, et un peu baveuse. Elle fait germer des idées un peu vaseuses, car elles s’embourbent en voulant sortir de leur coquille. Elles se développent lentement comme les cornes de l’escargot, mais ces idées cornues n’en sont pas pour autant biscornues.

Parfois la pluie fait entendre un son agréable de grelot, tel celui de gouttes de rosée grelottantes, mais d’autres fois c’est un bruit de casseroles, tel celui que produit l’arrière-train  bardé de casseroles de quelques élus.

Après la pluie, les gourmands guettent dans les bois les pieds des arbres car, en voyant s’y ouvrir de petits parapluies, ils savent que ce sont des cèpes, qui vont leur mettre l’eau à la bouche.

Vous savez comme moi que ce qui est en haut est comme ce qui est en bas car, pendant qu’ici-bas des fêtes génèrent des pluies de confettis, en haut dans les cieux une pluie d’étoiles filantes crée un ballet d’étoiles.

Amis poètes, souvenez-vous de votre plaisir lorsque, en automne, vous assistez  à  une averse de feuilles mortes, qu’ensuite  le vent entasse.

Mais souvenez-vous aussi de votre tristesse quand, au retour, vous découvrez, dans votre boîte aux lettres, la pluie des feuilles d’impôts qui s’y sont entassées.

Même un non-gastronome préfère des asperges en sauce plutôt que se faire asperger et saucer par la pluie.

Le poète aime voir dans un jardin tomber la pluie qui favorise la germination des plantes, et il souhaite que cette contemplation de la nature favorise en lui l’éclosion d’une pluie d’idées originales et de rimes riches.

Il aimerait que son cerveau soit submergé par une ondée d’ondes poétiques à haute fréquence, et que leur flot, en se retirant, laisse sur la plage de son esprit un large étalement d’idées nouvelles.

Dans notre Cave nous goûtons la pluie, et même nous la savourons goutte à goutte, quand c’est une pluie d’applaudissements et de compliments.

Je termine par une confidence. Alors que les Egyptiens d’autrefois croyaient en plusieurs dieux, on croit en voir deux dans notre Cave, Pierre et Jean-François Blavin, car ils ont le pouvoir divin d’y faire la pluie et le beau temps.
Ils sont les créateurs de chaque réunion au cours de laquelle pleuvent sur nous une cataracte, un déluge, une avalanche de beaux poèmes.                                                              

© Pierre Daumas

 

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