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À la mémoire de Maître Adam*

* Adam Billaut

Sous le pas de l'oubli toute chose s'efface.
Qui pourrait se fier à l'immortalité ?
Nul ne peut espérer de laisser une trace ;
Le génie lui aussi n'est donc que vanité !

Ô toi qui, comme moi, pressé d'un saint délire,
De l'esprit et du corps alternas les travaux,
Je demande au passé quelques sons de ta lyre,
Et le passé pour toi n'a presque plus d'échos,

Puisse ma voix fidèle, éveillant ta mémoire,
Au fond de ton tombeau te faire tressaillir !
Mon luth n'aura-t-il pas assez fait pour ma gloire,
S'il réveille pour toi l'écho de l'avenir ?

Du moins le tien, joyeux, de l'âtre égayant l'ombre,
De l'atelier encore enchantait les labeurs ;
Hélas ! pourquoi faut-il que le mien, triste et sombre,
              Ne répète que mes douleurs !

Riant des biens, des maux, tu traversas la vie.
Le peuple aussi de toi n'a conservé qu'un chant.
Mais les temps sont changés, et ta philosophie
À rire, de nos jours, eût eu moins de penchant.

Mais tu vis se lever cette aurore brillante
Du siècle de Louis où tout fut merveilleux...
Est-il donc étonnant que ta voix nous enchante
En préludant au jour, chantre mélodieux ?

Heures de loisir, 1846

P. Sécheresse (1811-1857) était menuisier.

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