Porte

Ma voix heurtait la lumière. Des mots hors gabarit, déplacés, dégingandés. Des mots qui soudain se figent, maladroits, sur le seuil.

La porte - fausse transparence encadrée de chêne - exhibait, aguicheuse, sa béquille de porcelaine. Mais dans quel sens se déverserait le flot ? Derrière, des gastéropodes inquiets rentraient déjà leurs cornes.

D'un sifflet, j'ai rappelé mes mots. Je les ai réduits, triturés, blanchis, sublimés en un rien de fumée, une volute bleue de cigarette.

Un poème. Un souffle à peine, pénétrant par les interstices, sans déranger. Mais qui s'en apercevra ? Il faudrait vraiment vouloir comprendre.

Serge Dinerstein
La Paille du lin, éd. Gerbert, 2005.

© S. Dinerstein