Qu’est-ce que la Cave ? | La Trougne, fin de partie Discours de Christian Gros
Le Chef est un être magique,
C'est un grand esprit, dédaigneux,
Mais quand la Camarde, en émoi, Mise en vin par Marielle-Frédérique Turpaud Puisque tu es mort, Gérard TROUGNOU... (Sauf que là, tu n'es pas encore tout à fait mort... mais tu nous quittes, cependant)... Puisque tu es presque mort, donc, Groniard TAINIOU, nous n'allons pas t'enterrer dans un grand champ de blé, comme l'a chanté Gilbert Bécaud ; Ni dans un champ de naviots, comme l'a écrit Gaston Couté ; Ni sur la plage de la Corniche, comme l'a dit Georges Brassens... Non !... Nous allons t'enterrer dans notre cœur, là où ça fait « Boum-boum !... Boum-boum !... Boum-boum !... », ce qui te rappellera les coups frappés, en vain, par la célébrité à la porte de ta vie. Dans notre cœur où tout est rouge, ce qui te rappellera également le sang de la treille dans lequel tu puisas si souvent ton inspiration... Jusqu'à en expirer, aujourd'hui, puisque tu nous quittes à jamais, Gréjard NOUTROU. Taguard GOUDROU, tu nous quittes pour aller te percher dans le Perche, et pêcher la perche des océans qui, comme chacun le sait, se fait rare, puisque c'est un poisson d'eau douce. Mais cela ne te dérange pas, pauvre pêcheur ! Car tu appâtes au vers libre et, de ce fait, tu n'attrapes jamais rien... Sauf froid aux pieds... Placard SANTROU, tu viens nous annoncer, ce soir, que tu nous quittes pour cause de chiffonnage ulcérique de l'estomac, de burn-out du sous-sol, de nervous breakdown du « faites-court-s'il-vous-plaît-il-y-a-beaucoup-de-monde-ce-soir », et d'ulcère de l'ouïe, ayant supporté 22 années durant nos crises d'égo. Bien sûr, tous les hommes sont égaux !... Mais c'est vrai que les poètes, lorsqu'ils s'y mettent, sont plus ego que les autres, et ça, ça t'a usé, Gnétard GOUROU... Nous t'avons, en quelque sorte, « dégoté », ancien verbe issu de la contraction des deux termes « ego » et « dégoûter ». Et quand on a la chance, comme nous l'avons eu, de dégoter un Haguard TROGNON encore vivant et toujours debout au fond d'une cave déjà voûtée, on se le garde, précieusement ! Tu n'avais donc aucune chance de nous échapper... Sauf à mourir, comme tu viens de le décider aujourd'hui, Mauviard SAINDOU... Tétard BOUBOU, tu vas donc nous quitter !... Le comprends-tu bien, que tu vas nous manquer ?... Tu vas nous manquer comme manquerait un manche à un balai ; Une Manche au Pas-de-Calais ; Deux manches à une veste ; Dimanche à une semaine ; Arromanches au Calvados... Mais cependant nous t'oublierons ! Nous t'oublierons, Vantar DUCHOU, le jour où nous aurons réussi à faire dérailler le transsibérien au passage à niveau de la gare de Saint-Pol de Léon ; Nous t'oublierons, c'est certain, quand nous aurons embarqué sur son bateau afin de dessoûler Rimbaud ; Quand nous serons descendu dans nos vers pour découvrir qu'il n'y reste plus rien à rimer ; Quand la sagesse, de ses longs doigts, aura courbé nos échines afin de nous rendre humbles et tolérants ; Quand, ayant définitivement quitté le ciel, la lune aura fait place à la lautre... Le jour où nous aurons franchi toutes ces étapes, nous t'oublierons, Jobard GROUNOU ! ! ... Évidemment. Évidemment... Dans le cas, toujours probable, où nous ne parviendrions pas à surmonter tout ou partie de ces obstacles... Nous ne pourrons t'oublier ! Ton souvenir, alors, nous hantera jusqu'à la fin des temps, et même après, lorsque tout se met à devenir flou, et mou. Et par les nuits lugubres d'un hiver attardé, quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvre-plat, lorsqu'au moment de basculer dans un sommeil chaotique nous verrons de longs pans de brume masquer la lune afin de nous recouvrir des draps humides de nos cauchemars, alors, ALORS, ton spectre nous apparaîtra, magnifique et rassurant, repoussant les maléfices de nos angoisses de sa simple présence irradiante, rassurante, cautérisante, blablablante, et tsétérante.... Bon. Bien sûr, cette dernière tirade peut paraître emphatique... Voire dithyrambique... Certains chicaneurs diront même flagorneuse. Mais n'oublions pas que nous avons des poètes devant nous, ce soir. Des êtres simples et basiques. Faut qu’ça claque ! Faut qu’ça brille ! Faut qu’ça en jette ! Faut qu’ça équarrisse le quotidien ! Faut qu’ça décoiffe, même les chauves ! Faut qu’ça tranche dans l’lard, comme dirait l'imam. L'important est que la feuille soit remplie, jusqu'en bas ! Et s'il y en a deux, c'est encore mieux ! S'il y en a trois, c'est inespéroit ! Car on reconnaîtra l'importance du défunt enterré à la longueur du discours prononcé. Voilà. J'ai fini. Trouillard BINIOU, tu viens d'entendre ton hagiographie. Tu n'as pas l'air d'en avoir pris la mouche, et j'en suis rassuré. Car de la même façon qu'au pied du mur on reconnaît le maçon, au pied de la mouche on reconnaît le moucheron. Tu peux donc t'envoler, Blizzard TROUMOUCHE, avec tes ailes de pouèt. Vole dans nos pensées, après avoir pondu tes œufs trougniques dans le nid abandonné de cette cave, afin qu'ils y éclosent à chacune de nos futures réunions poétiques ! Nous te regarderons, toujours, planer dans le ciel de nos rimes, puisque tu n'y disparaîtras jamais. Et si Calliope, un jour, nous demande : Nous pourrons lui répondre : Et la divinité se taira. Discours gravé dans le temps, le lundi 06 juillet 2015, à l'occasion du trépas trougnesque.
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