Puisqu’il faudra bien y passer
Je voudrais, à l’instant critique,
- Juste au moment de trépasser -
Avoir un éclair érotique.
Car troquer la fin de ma vie
Contre un dernier petit plaisir
Ne me semble pas un devis
Hors de portée de mon désir.
Je n’ai jamais été envieux,
Jamais demandé l’impossible ;
Mais lorsque je serai très vieux
J’aurai un vœu compréhensible :
Si ce n’est pas trop demander
J’aimerais qu’au dernier virage
Une angesse dégingandée
M’entraîne à l’ombre des fourrages
Pour qu’avant mon équarrissage
- Ayant pitié de ma carcasse -
Elle me calme d’un massage
À petits coups d’aile efficaces.
Ah ! Mourir en goûtant de la
Compassion d’une Femme-oiseau
Qui, de ma vie vers l’au-delà,
Me servirait d’intermezzo !
Car je ne peux croire un instant
Que les anges soient asexués :
Que signifierait tout ce temps
Passé à en avoir tant sué
Si je ne pouvais profiter
- Ne serait-ce qu’une seconde -
D’une angesse, en totalité,
De sa plume vierge et profonde,
De cet endroit sombre et humide
Où son trésor surgit des eaux...
Pendant que j’oserai, timide,
La Mort me prendra, os à os...
Christian Gros
© Christian Gros
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